La vérité sur l'huile de palme durable utilisée par les multinationales (RSPO)

L’huile de palme est la graisse la moins chère du monde. Elle supporte les températures élevées et reste solide à température ambiante. Pour les industriels, c’est l’huile parfaite. Pas étonnant qu’elle ait envahi les rayons de nos supermarchés et noyé nos moteurs de voiture. Près d’un produit sur deux vendu dans le monde occidental contiendrait cette huile.

Entre 1990 et 2019, plus de 10 000 000 d’hectares ont été consacrés à la culture de l’huile de palme, les feux de forêt volontaires visant à étendre les cultures ont projeté l’Indonésie comme le 4ème émetteur de CO2 en 2015. (1)

C’est pour endiguer les critiques croissantes à l’égard de l’huile de palme que des entreprises comme Unilever et Ferrero ont créé en 2004 le « Roundtable for Sustainable Palm Oil », dite RSPO. L’organisme s’est donné pour mission de produire de l’huile de palme « durable », censée garantir l’absence totale de déforestation. ‍

L’organisation inclut des milliers d’adhérents : producteurs d’huile de palme, négociants, acteurs de la grande consommation, de la grande distribution, banques et investisseurs, ainsi que des ONG (comme WWF).

Un projet intéressant sur le papier, mais qui en réalité ne tient pas ses engagements : la « RSPO » n’est pas en mesure d’effectuer des contrôles sur le terrain. Elle se fonde uniquement sur des études d’impact réalisées par des bureaux d’études accrédités par la RSPO elle-même.

David Gaveau, cartographe, a étudié l’évolution de la déforestation depuis 20 ans en Indonésie et en Malaisie. Au fil de ses recherches, il a constaté une accélération de la déforestation dans les concessions d’huile de palme durable à partir de 2004, date de la création du RSPO. (2)

D’après Greenpeace, la conclusion est sans appel : la RSPO est entre les mains des industriels et ne permet pas de lutter contre la déforestation qui, si elle continue au rythme actuel, aura dévasté 98 % des forêts indonésiennes d’ici 2022 ! (3)

L’huile de palme durable manque de transparence

La certification RSPO a été critiquée pour son manque de transparence et de rigueur par de nombreuses ONG. L’organisation est accusée de ne pas être efficace pour assurer la traçabilité de la production de l'huile de palme et de ne pas répondre de manière adéquate aux accusations de violation des droits des humains.

Le cahier des charges de l’huile de palme durable est considéré comme beaucoup trop laxiste. Si des améliorations ont été vues ces dernières années, aucun objectif annuel concret n’a été défini (4).

Un rapport de l’UICN résume la situation par un constat terrible : la certification RSPO d’huile de palme durable est peu efficace pour ralentir la déforestation (5). Il est également important de rappeler que l’huile de palme durable ne signifie pas que l’huile est biologique ou encore équitable.

La notion de durabilité est un mot fourre-tout qui permet aux industriels d’induire les citoyens et citoyennes en erreur. Pour être certifiée biologique, l'huile de palme devrait être produite selon des normes de production biologique strictes, qui interdisent l'utilisation de produits de synthèse, de pesticides et d'engrais chimiques.

Actuellement, la plupart des palmiers donnent un rendement pendant 25 ans. Les terres sont ensuite abandonnées, leurs sols étant gorgés de pesticides comme le paraquat, un puissant neurotoxique commercialisé par l’entreprise Syngenta, membre de la RSPO, qui est interdit en Europe depuis 2007 (6).

Quelles solutions pour enrayer la déforestation ?

Mettre fin à la monoculture d’huile de palme

La monoculture est une forme de production agricole qui consiste à cultiver une seule espèce sur une grande étendue de terre. La monoculture de l'huile de palme a entraîné la déforestation, la dégradation des écosystèmes, l’effondrement de la biodiversité, et la dépendance à des pesticides et des engrais chimiques.

Chanee, le créateur de l’association Kalaweit, insiste sur le mode de production en monoculture de l’huile de palme. Parce que la durabilité de l'huile de palme dépend de la façon dont elle est produite et que, comme pour tous les produits, il existe des exemples de mauvaise pratique et de bons exemples.

En réalité, on n’a rien contre le palmier à huile en lui-même, c’est la méthode, c’est la monoculture d’huile de palme qui fait du mal. Vous avez une huile de palme traditionnelle en Afrique et ça se passe très bien. Pour une agriculture de subsistance, des palmiers à huile mélangés à la forêt, il n’y a aucun souci. 

Chanee, fondateur de l'association Kalaweit

Pour lutter contre la déforestation, l’association Kalaweit rachète la forêt tropicale pour la transformer en réserve naturelle. Une solution qui permet aux villageois locaux de continuer la culture du rotin, la pêche, et la cueillette tout en écartant les actes de déforestation ou de braconnage.

Réduire notre consommation d’huiles

Tirée par la demande de l’agroalimentaire, des cosmétiques et shampoings, des produits d’entretien, et maintenant des automobilistes pour substituer du diesel, la consommation d’huiles et graisses végétales a été multipliée par 8 en 50 ans dans le monde.

Mais remplacer l’huile de palme par une autre huile est une mauvaise idée car le palmier fournit 6 fois plus d’huile à l’hectare que le tournesol et 10 fois plus que le soja. Plutôt que de chercher à la remplacer par une autre huile nécessitant plus de surface cultivable pour le même rendement, nous devons réduire notre consommation d’huile en général.

Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), il est recommandé de limiter sa consommation d'huile à environ 20 à 35 % de l'apport calorique total quotidien, en fonction de l'âge et de l'activité physique. Cependant, dans de nombreux pays, les personnes consomment en moyenne plus de 35 % de leurs calories sous forme d'huile.

En bref, le meilleur moyen de lutter contre la déforestation reste incontestablement de privilégier des produits sans huile ajoutée et sans ingrédients d’origine animale.